posted by dbouffard - 03/21/14

Les fringantes natures mortes d'Étienne Lafrance
Par Normand Babin, Montréalistement

En peinture, la nature morte a été revisitée à peu près à toutes les époques. Au cours du XXe siècle, la nature morte a été une des portes d’entrée vers l’abstraction. Au XXIe siècle, l’abstraction a curieusement provoqué un certain retour à la nature morte. Le focus de l’artiste s’est élargi, et au lieu de voir le nano détail d’une texture on nous donne à voir la scène dans laquelle cette texture était imbriquée. Fort d’influences diverses, le retour au figuratif pour certains s’agrémente de toute une dimension citationnelle des styles et des courants artistiques, mouvement que l’on pourrait qualifier de post-moderniste.

Étienne Lafrance présente actuellement à la galerie Dominique Bouffard une série  d’Intérieurs que nous pourrions qualifier de natures mortes. Quoique. Tellement vibrant et vif, le corpus de Lafrance porte plutôt à croire à une surdose de vitalité. Tout y vit, la flore y est exubérante. Les toiles sont en partie des collages de textures qu’il fait lui-même à l’encre et par d’autres médiums, découpés ces dessins prennent la forme d’un pied de table, d’un caillou ou d’un détail architectural. Insérées sur une toile au fond déjà élaboré, ces pièces collées apporte une troisième dimension à la toile, un relief, aussi mince soit-il, qui délimite plus clairement qu’à la peinture, les perspectives de l’image.  Accompagnant ces toiles, de très beaux photogrammes (impressions photographiques directes sur le papier) et d’émouvantes aquarelles. Sur papier blanc, invisible puisque entièrement recouvert de noir, un motif floral de différentes intensités de noirs offre au regard une image d’une grande poésie.

Le contraste entre les grandes toiles très colorées et vives avec les photogrammes et les aquarelles noirs saisit le visiteur d’emblée. Les Intérieurs d’Étienne Lafrance ne sont pas qu’architecturaux, il sont aussi, à certains égards, psychologiques. L’imagerie presque naïve de l’artiste ne devrait donc pas laisser place à une interprétation superficielle de ces œuvres. Après avoir observé les aquarelles, on se surprend à découvrir dans les grandes toiles une dimensions onirique et analytique qu’un regard pressé ne nous avait pas permis de percevoir. Une œuvre sérieuse et profonde pourvu qu’on s’y abandonne.

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